Nous avons pris connaissance, quelques jours après le secrétaire d’État, de l’arrêt rendu dans l’affaire de la famille syrienne ayant demandé un visa humanitaire.

En septembre 2016, l’État belge a pris une décision de refus de délivrance du visa. Le Conseil du contentieux des étrangers (CCE) a contraint ce dernier à prendre une nouvelle décision mieux motivée, considérant la première décision comme illégale.

Le fait que la nouvelle décision remplace l’ancienne était jusqu’ici une jurisprudence constante, aussi bien auprès du Conseil d’État qu’auprès du Conseil du contentieux des étrangers. Conformément à cette jurisprudence, nous n’avons pas attaqué cette première décision. Attaquer une décision inexistante (puisque remplacée par une autre postérieure) est en effet inutile.

Mais dans cette affaire politiquement très lourde, la jurisprudence a changé. Pour ce dossier, le CCE a décidé que la première décision reste pendante, même si l’État belge a pris une nouvelle décision portant exactement sur la même demande.

Il est déplorable de constater que, précisément dans ce dossier, la jurisprudence fasse un revirement à 180°. Le CCE prend une décision purement technique, avec comme conséquence qu’il n’est plus nécessaire pour le tribunal de se prononcer sur le fond de l’affaire.

Dans ce dossier, nous avons pu constater qu’au final peu importe ce qu’un tribunal décide. Si le contenu d’une décision ne correspond pas à la volonté d’un secrétaire d’État, cette décision n’aura en réalité aucune valeur.

Cette affaire ne donne aucune réponse à la seule véritable question qui se pose : comment peut-on éviter que ceux qui sont en danger de mort n’en viennent à risquer leur vie en mer en faisant appel à des passeurs ?

En tant qu’avocats nous sommes déçus par cette décision. Mais nous sommes cependant avant tout inquiets de la manière dont l’État belge a géré ce dossier, à savoir qu’une décision exécutoire rendue par un Tribunal ne doit plus être respectée, que la communication d’un secrétaire d’État peut consister en des mensonges et en une campagne de dénigrement de personnes en danger, et que “twitter” a plus de portée que les lois de notre pays. En tant qu’avocats engagés, nous prenons nos responsabilités face à une injustice aussi flagrante. Nous allons d’autant plus nous engager pour le respect des droits fondamentaux et dans la défense des victimes de cette politique inhumaine.

http://www.lalibre.be/actu/politique-belge/visa-a-une-famille-syrienne-les-avocats-sont-decus-et-fustigent-l-attitude-de-l-etat-58d934aacd70c4583cfb690d